Du SGCI au SGAE

Placé sous l’autorité du Premier ministre dès sa création, le SGCI a été revendiqué par le ministère de l’Économie et des Finances et le ministère des Affaires étrangères. Dès l’origine, ces deux ministères ont souhaité assurer la gestion du service et garantir la répartition des fonds du Plan Marshall. Le décret de 1954, puis la convention de gestion de 2011 ont acté le rôle prépondérant du ministère de l’Économie et des finances dans la gestion de cette administration.

« Le SGAE est toujours un service du Premier ministre dont le budget est géré, depuis un décret du 10 juillet 1954, par le ministère de l’Économie et des Finances. Le choix qui a été fait en 1958 de conserver cette configuration au détriment d’un rattachement au ministère des Affaires étrangères ou au ministère des Finances, voire même de la création d’un ‘ministère de l’Europe’, se trouve à nouveau confirmé […] Le rattachement au Premier ministre permet ainsi, dans un jeu interministériel parfois conflictuel, d’arbitrer en faveur d’une position commune qui s’impose à tous avalisée par le chef du gouvernement. » (Dulphy, A. & Manigand, C, 2009)

Le double rôle, politique et administratif du Secrétaire général, à la fois « Conseiller Europe » du Premier ministre et secrétaire général du SGCI, démontre tout l’intérêt des différents Premiers ministres pour cette administration chargée des questions européennes. Seuls deux secrétaires généraux, Elisabeth Guigou en 1985 et Philippe Léglise-Costa en 2014 ont dérogé à ce principe, en étant « Conseiller Europe » du Président de la République.

Les évolutions du SGCI au fur et à mesure de la construction européenne

En 1957, les agents du SGCI participent activement aux négociations du Traité de Rome. Dès lors, le SGCI s’adapte aux nouveaux besoins de la construction européenne tout en conservant ses missions auprès de l’OECE puis, à partir de 1960 auprès de l’OCDE.

En 1981, le Premier ministre dans sa circulaire du 7 avril, charge le SGCI de coordonner les positions françaises relatives au traité Euratom, sans modifier le décret de 1958.

Par la suite, la loi constitutionnelle n° 92-554 du 25 juin 1992 ajoute à la Constitution un titre XIV : « Des Communautés européennes et de l’Union européenne ». L’article 88-4 introduit et renforce, dans la Constitution, le rôle du Parlement français. Le Gouvernement a désormais l’obligation de lui soumettre les projets et propositions d’actes de l’Union européenne. Dans le cadre de ses relations institutionnelles, le SGCI est chargé d’informer le Parlement et de veiller au bon déroulement de la procédure permettant au Parlement de voter des résolutions sur les « propositions d’actes communautaires comportant des dispositions de nature législative ». Il permet ainsi d’associer le législateur national à l’élaboration des normes communautaires.

Le Titre IV du Traité de Maastricht signé en 1991 prévoit la création d’un troisième Pilier, concernant la justice et les affaires intérieures. À la suite de l’ajout de ces nouvelles compétences, le SGCI se dote de nouveaux secteurs, chargés de la libre circulation des personnes ainsi que de la coopération judiciaire civile et pénale, la coopération douanière et la coopération policière.

De la même manière, en 1997, à la suite du Conseil européen d’Amsterdam, le SGCI crée un nouveau secteur, chargé de l’élargissement de l’Union européenne.

En 2000, le cabinet du Premier ministre prend la décision, dans une circulaire du 11 mai 2000, de transférer, au profit du SGCI, la coordination interministérielle pour le traité Euratom. Un nouveau secteur est alors créé à cet effet qui travaille en étroite collaboration avec le comité technique interministériel pour l’Euratom (CTI).

La circulaire du 31 mars 1994 précise les relations des administrations françaises, dont celles du SGCI et de la représentation permanente auprès de l’Union européenne, avec les institutions européennes.

Le changement de nom

En 2005, les Français refusent de ratifier le traité « établissant une Constitution pour l’Europe  ». Après ce référendum, de nombreuses mesures sont prises afin de rassurer les partenaires européens et montrer que le rejet du traité ne constitue pas un rejet de l'Union européenne. Dominique de Villepin, alors Premier ministre, se montre notamment soucieux de « changer la place des affaires européennes dans le fonctionnement politique de notre pays » (Discours du Premier ministre Dominique de Villepin lors de la XIIIe Conférence des Ambassadeurs des 29-31 aout 2005).

Dans ce contexte post-référendaire, l’article 2 du décret 2005-1283 du 17 octobre 2005, consacre la création du « SGAE ». Le SGCI prend le nom de Secrétariat général des Affaires européennes et modifie ses missions. L’article 5 abroge les décrets du 25 juin 1948 et du 3 avril 1958.

La naissance du SGAE « […] consacre l’évolution du SGCI dont la dénomination ne correspondait plus aux fonctions effectivement exercées […] » (Virginie Lanceron, 2007).

Le SGAE déménage et s’installe rue de Bellechasse en 2011, afin de se rapprocher des services du Premier ministre et accroître encore son rôle de coordonnateur des positions françaises en matière européenne.

Enfin en 2023, la cellule de mobilisation des fonds européens est créée. Elle a pour principal objectif la maximisation de l’usage des fonds européens par les opérateurs français.

« La forte centralisation interministérielle du processus de décision et de négociation constitue la colonne vertébrale de l’action politique et administrative française en matière européenne. Même s’il demeure absolument essentiel que les ministères conservent les compétences et le degré d’autonomie d’action utiles à la réalisation de leurs objectifs européens – que ce soit en terme de négociation comme de transposition de la norme en droit national – il est néanmoins évident que sur trois grandes catégories de sujets, le renforcement du rôle du Secrétariat général aux affaires européennes (SGAE) depuis 2005 s’est traduit concrètement par une plus grande capacité de la France à faire valoir ses positions sur la scène européenne : l’influence sur les travaux du Parlement européen d’une part, le suivi de la présence et de l’influence françaises dans les institutions de l’Union d’autre part, et le développement d’une stratégie. »
(Arnaud Magnier, 2016)